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mercredi, mars 28, 2007

SIDA

Quelle est l'histoire naturelle de la maladie ?
Le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) infecte préférentiellement les cellules du système immunitaire avec apparition progressive d'un déficit immunitaire.Pendant une longue période, les patients infectés n'ont pas de manifestations cliniques.Lorsque le déficit immunitaire devient important, des infections et des tumeurs surviennent et font entrer le patient dans le stade de la maladie SIDA.
Une évolution très variable d'une personne à l'autre
Avec le recul du temps, il apparaît qu'en moyenne il se passe environ 12 années entre la contamination et le développement de la maladie SIDA.Cependant, l'évolution de l'infection est extrêmement variable et certains individus (20% environ) évoluent en cinq années vers le SIDA alors que d'autres (5 à 7%) ne développent pas de symptômes (sujets asymptômatiques) pendant 15 à 20 ans d'infection.Des travaux majeurs très récents publiés en 1996 éclairent d'un jour nouveau la dynamique virale. Au moment de la primo-infection (premier contact de l'organisme avec le virus) qui va de la contamination à la séroconversion (apparition dans le sang des anticorps dirigés contre le virus), il y a une véritable explosion de la multiplication virale qui prend place dans les organes lymphoïdes.De là, les virus produits passent dans le sang. Commence alors la phase asymptomatique qui est silencieuse sur le plan clinique.Au bout d'une période de temps variable, le système immunitaire semble perdre la bataille contre le virus et les symptômes de la maladie apparaissent. Même si l'espérance de vie des patients augmente régulièrement, l'issue est à plus ou moins long terme fatale chez la plupart des sujets s'ils ne reçoivent pas un traitement efficace (Schéma).
Le virus se réplique constamment et à un niveau élevé
Il y a peu encore, il était admis que le silence clinique avant l'apparition du SIDA correspondait à une latence virale pendant laquelle le virus se répliquait à bas bruit au sein des cellules.Il a été possible de calculer qu'en réalité, le virus ne cesse de se répliquer et ce, à un niveau considérable. Ainsi, chaque jour, sont produits de l'ordre de 10 milliards de virus. Cette réplication intense et constamment stimulée prend place dans les organes lymphoïdes au sein desquels les interactions entre lymphocytes T4, macrophages et cellules dendritiques sont importantes.Cette réplication virale très active favorise l'apparition de mutations et la production de nouveaux variants du virus qui échappent aux traitements antirétroviraux pris en monothérapie (un seul médicament) . Pourquoi au bout de quelques années, le taux de lymphocytes T4 s'effondre-t-il et signe-t-il l'entrée dans la maladie SIDA ?La grande difficulté tient au fait que le virus étudié en culture en laboratoire (in vitro) n'est pas le même que celui qui infecte un patient (in vivo), en effet, le virus humain mute constamment pour échapper au système immunitaire du patient.Des études sur des cultures de virus provenant de personnes infectées, et prélevés à différents stades de l'infection, montrent que le passage de l'état asymptomatique (qui manque de symptôme clinique) au stade SIDA s'accompagnerait d'un changement dans les caractéristiques de virulence (capacité à infecter une cellule) des souches de VIH. D'autres études ont permis de déceler dans le sang des sujets séropositifs deux types de virus différents (variants) présentant in vitro des propriétés différentes : les virus précoces et les virus tardifs . Les seconds sont plus virulents que les premiers ; ils se répliquent plus rapidement et possèdent un tropisme cellulaire différent . Au début de l'infection et pendant toute la période asymptomatique, les virus précoces sont prédominants tandis que chez les sujets atteints de SIDA, les virus tardifs sont prépondérants.Ces observations faites in vitro dans le laboratoire ne peuvent être extrapolées sans précaution à la situation chez les personnes malades qui est, par nature, infiniment complexe. Il semble néanmoins que les variants "précoces" du virus sont remplacées par des variants "tardifs", plus virulents, au fur et à mesure de la progression de la maladie.L'émergence de ces souches tardives serait ainsi associée à une progression accélérée de la maladie et serait parallèle à la baisse des T4 provoquant l'immunodépression. La chute des T4 est-elle la cause ou la conséquence de l'apparition de ces virus virulents ? Personne ne peut encore répondre à cette question.
Comment le virus pénètre-t-il dans les cellules ?
Le VIH, comme tous les virus, a besoin d'une cellule hôte pour se répliquer. Il a pour cibles principales deux types de globules blancs qui jouent un rôle majeur dans la réponse immunitaire, le lymphocyte T4, et le macrophage. Avant de pouvoir pénétrer dans les cellules cibles, les lymphocytes T4 et les monocytes, le virus doit se fixer à une protéine cellulaire, la protéine CD4. Cependant, les chercheurs se sont vite aperçus que le récepteur CD4 n'était pas suffisant et ont soupçonné très tôt l'existence d'autres récepteurs. La chasse aux récepteurs a occupé pendant des années de nombreux laboratoires.
La découverte d'inhibiteurs de la réplication virale
Un clinicien californien, Jay Levy suit depuis le début de l'infection à VIH un groupe de sujets "non progresseurs à long terme"(patients séropositifs qui au bout de 15 à 20 ans de contamination par le virus ont la particularité de rester asymptomatiques et en bonne santé). Dès 1985, il avait constaté que chez ces sujets certains globules blancs (les lymphocytes T8) produisent des facteurs solubles capables d'inhiber in vitro la réplication du virus.La nature de ces facteurs reste mystérieuse. En décembre 1995, une équipe italienne (P. Lusso) en collaboration avec une équipe américaine (R. Gallo) annonçait avoir identifié des facteurs inhibiteurs : il s'agit de trois molécules connues appartenant à la famille des bêta-chimiokines, des petites protéines impliquées dans le chimiotactisme et les réponses inflammatoires. Ces chimiokines se lient in vivo à des récepteurs situés dans la membrane des lymphocytes.La découverte de l'implication des chimiokines dans l'inhibition de la réplication du VIH a considérablement stimulée les recherches sur les récepteurs de chimiokines.
De nouveaux récepteurs pour le virus
En l'espace de quelques mois, de janvier à octobre 1996, des découvertes majeures faites sur les co-récepteurs du VIH et le mécanisme de l'infection se sont succédées. Une première équipe découvrait qu'une molécule appelée fusine (renommée depuis CXCR4) était un co-récepteur du VIH et que ce récepteur était spécifique des virus tardifs, ceux qui apparaissent associés à l'apparition du SIDA.Ces travaux ont soulevé immédiatement la question : Y aurait-il un autre co-récepteur du VIH mais spécifique des virus précoces, ceux qui prédominent au début de l'infection ? En juin, cinq équipes indépendantes publiaient leurs travaux et répondaient positivement à la question. Il existe un deuxième co-récepteur du VIH. Ce récepteur appelé CCR-5 spécifique des variants précoces est capable de lier les trois chimiokines, celles qui inhibent l'entrée du virus in vitro. En occupant leur site de liaison sur le récepteur, ces trois molécules empêchent le virus de se fixer et donc de pénétrer dans les lymphocytes..En août dernier, une équipe française (JL Virelizier, Institut Pasteur,Paris) en collaboration avec une équipe suisse (M. Baggiolini, Berne) découvrait que le ligand naturel qui se fixe sur le co-récepteur CXC-R4 est une molécule non encore caractérisée à ce jour, appelée SDF-1. De ces remarquables travaux, il ressort que les virus précoces et les virus tardifs, s'ils requièrent la présence du récepteur CD4 sur les lymphocytes, ont en réalité un tropisme moléculaire (capacité à se fixer sur une molécule) différent : les souches précoces utilisent CCR5 comme co-récepteur et leur entrée dans les lymphocytes est inhibée par les trois bêta-chimiokines pré-citées ; en revanche, les souches tardives utilisent, en plus de CCR5, CXCR4 comme co-récepteur et la chimiokine SDF-1 bloque leur entrée dans les lymphocytes.
La résistance naturelle à l'infection
En dépit d'une exposition répétée au virus VIH, certaines personnes demeurent séronégatives et semblent donc résister à l'infection. Des études in vitro ont montré que les cellules de ces sujets résistent totalement à l'infection par des souches précoces, celles qui utilisent le CCR5.Ce récepteur serait-il absent ou anormal ?Des études génétiques ont confirmé la présence chez ces sujets d'une mutation sur le gène codant pour le co-récepteur CCR5.1% de la population blanche (dite caucasienne) a, du fait d'une mutation homozygote, une résistance quasi absolue à l'infection du virus.20% de la même population porteur d'une mutation hétérozygote n'est pas protégée contre l'infection, mais a une progression ralentie de la maladie.La découverte de ces nouveaux récepteurs du virus VIH et des chimiokines capables d'inhiber l'infection virale ouvre des pistes thérapeutiques radicalement nouvelles. Ainsi, on peut imaginer fabriquer des molécules proches des chimiokines qui seraient capables de bloquer la fixation du virus VIH sur les co-récepteurs . De telles recherches sont en cours même si l'application thérapeutique peut paraître lointaine.